Rapport de florian, mon meuble (1ere partie)
ETAT D’ESPRIT AVANT LA SEANCE
L’arrivée : J’éteins le moteur. Ca y est, j’y suis. C’est moi ou je transpire ?! J’ai bel et bien les mains moites. A l’intérieur, c’est pire… cette salade d’émotions et de pensées désordonnées m’incommodent. De grandes respirations pour essayer de trouver un peu de répit… « Bon allez stop ! Sors de la voiture ». Le temps de me demander quelle partie de moi vient d’invectiver quelle autre que je suis déjà en train de fermer la portière, les doigts fébriles. J’aimerai tellement faire bonne impression… Mais enchaîner deux phrases sans bégayer me paraît déjà un objectif ambitieux.
Un œil sur le téléphone… Encore 3/4 d’heure. Oui, j’ai le temps… Alors pourquoi tant de trac ? Quelques derniers préparatifs, un appel pour dire que je suis bien arrivé… puis allons marcher. Ça devrait me faire du bien.
Je lance quelques pas, et… je me souviens : les articles… les messages… les discussions… la bienveillance… tout devient fluide. « Tu es en sécurité florian, lâche prise. »
La rencontre : Une trentaine de minutes s’écoulent sans attente, au gré du passage de quelques oiseaux, trois voitures et un ou deux fantasmes. Un bruit de moteur s’avance. Au volant, une jeune Femme au regard sibérien me fixe et m’octroie un léger sourire. Un nuage électrique vient se coincer dans mon ventre. C’est Elle.
– « Monte« .
Fini la fluidité. Je m’affaire rapidement pour prendre tout mon petit matériel. Saisi par son charme et avec le nuage qui gronde, ma seule préoccupation maintenant est de savoir si j’arriverai à bredouiller quelque chose d’intelligible une fois dans la voiture.
Le trajet : La durée ? Difficile à dire. Mon état ? Chaud, froid, chaud, froid… puis cette douce sensation d’être comme dans un wagon…
Mine de rien, tout s’est mis à tourner autour d’Elle depuis notre prise de rendez-vous. Mon agenda, mon organisation, cette journée où je me suis levé pour Elle, mis en condition pour Elle, préparé, habillé… j’ai voyagé pour Elle; comme si tout autre chose était devenue secondaire. Et maintenant, oui, je suis enfin avec Elle. Elle tient les rênes : notre destination, l’atmosphère, les sujets de discussion… mes épaules s’affaissent. Je suis à ma place, à l’endroit exact où je dois être : sous son emprise. Rapidement, l’abandon s’immisce à nouveau. Je vais bien.
L’arrivée au Donjon : Nous nous arrêtons devant une porte. Sans savoir ce qui se trouve derrière, impossible de deviner. J’aime cette idée. Personne ne peut se douter de ce qui est en train de se tramer. Si les gens savaient… une rue ensoleillée, une scène anodine du quotidien où deux personnes descendent de leur voiture en se dépêchant à leurs occupations alors que je suis, en fait, en train de vivre un moment d’une intensité rare… j’aime cette vie.
Un sas d’entrée… une serrure récalcitrante… suspense… puis ce Lieu. Son atmosphère est évocatrice. Forcément. Mais il y a plus. Il est imprégné d’une énergie, d’une identité. Mon esprit se laisse un peu aller à l’évasion. Des images me viennent, s’enchaînent… personnages gothiques… décors londoniens… hall de châteaux des Carpates… la famille Adams………… la famille Adams ?!?
Ses allées et venues au rythme du tintement des talons me ramène de cet écart « vaudeville ». Quelque chose se prépare. J’avais oublié le nuage… lui, non. Mais pas de panique. Même si je me trouve, quand même, dans ce qui ressemble de toute évidence à une salle de torture, je suis en sécurité. Je le sais.
LA SÉANCE
Elle va se dérouler en musique. Mais jamais je ne me serai attendu à cette introduction… « Muse », l’album « absolution » en plus… d’une époque où le groupe était moins connus. La magie est de la partie. Cette musique est pour moi une référence profonde. Elle a marqué ma vie. Les frissons m’envahissent. C’est dingue. C’est un signe ! Je suis définitivement au bon endroit, avec La bonne Personne.
Un bandeau sur les yeux, je m’avance à quatre pattes vers des couvertures disposées en amont. Des caresses… c’est un message clair, un murmure : « …sécurité …prendre soin de toi. » Je me sens bien…
Des liens… encore cette douceur… mes pensées s’estompent… je perds le fil… des paradoxes s’élèvent…: Je suis de plus en plus prisonnier. Je suis de plus en plus moi-même, de plus en plus libre, de plus en plus vulnérable… contraint… protégé… impuissant… serein…
Je bascule sur le flan, tout doucement. Je suis « mis en place ». Cette sensation… encore un paradoxe ? Tendresse et toute-puissance. Manipulé avec soin, comme un objet précieux. Ma gorge se serre. Une gratitude ardente et silencieuse émane de tout mon être…
Des bruissements de chaise que l’on déplace… des chaussures à talons qui échouent sur mes mains… c’est le coup d’envoi. Ça y est. Elle m’utilise. Ses pieds cherchent le confort comme un chat fait ses griffes sur les velours d’un fauteuil. Mon corps se déforme, se reforme, à chacun de ses mouvements. Je suis bel et bien son objet. Le temps n’existe plus. Ses pieds se délacent. L’un arrive sur ma joue. Envahi par sa chaleur, je fonds de partout. L’autre, avec une délicatesse incroyable, vient honorer le creux de ma main. Mes doigts s’enserrent. Ma main est devenue un écrin. Les liens comblent ma condition immuable. Ma gorge se serre à nouveau… Je remercie le ciel de m’avoir fait ainsi, d’exister pour Elle.
La situation évolue. Je me retrouve sur le dos, ses pieds sur le torse. « Tu peux bouger les mains si tu veux… » Je comprends. Elle vient d’appuyer sur le bouton « On ». Dans un élan automatique, le massage régalien commence. Je suis emporté. Je ressens soudain une sensation que je croyais perdue. Enfin… enfin……… j’ai Quelqu’un à qui donner. Oui, je m’occupe d’Elle. J’ouvre les vannes. Je donne, corps et âme. J’opère tout en espérant qu’Elle profite. Je prie pour qu’Elle apprécie, ne serait-ce qu’un tant soit peu…
Un pied monte à mon visage. Il trône, sans retenu. Tout se mélange. La sensation d’être insignifiant est si forte qu’elle m’embrase de l’intérieur. Je n’arrive plus à coordonner mes mains. J’essaie de me recentrer pour reprendre ma mécanique, mes lèvres en forme de cœur sous sa peau tel un ado qui n’ose tenter un premier baiser… Quelle stimulation grisante : je lui donne de mes mains. Je reçois de ses pieds. Cet échange est parfait. Je suis nourri pour chérir.
Le tumulte des pensées revient… j’ai tellement envie de l’embrasser, tellement envie de l’étreindre de ma bouche. Mais impossible. Sans commande de sa part, comment le pourrais-je ? Elle l’a dit plus tôt : « un meuble ne bouge pas de lui-même » alors que j’essayais d’accompagner ses propres mouvements. Donc, hors de question de me permettre une telle initiative. Elle contrôle, de manière absolue.
Combien de temps dans cette béatitude ? Incapable de le dire. Je La chéris, et chéris encore, autant que possible. Je m’applique à chaque geste, tant que les siens ne viennent pas troubler ma raison. Je veux qu’Elle voit. Je veux qu’Elle sente à quel point il est naturel, évident de La choyer, de Lui appartenir.
La situation évolue encore. Je reviens à quatre pattes. Je deviens un siège pendant un instant. Puis la caresse des liens qui se défont me rabat un peu. Serait-ce possible que ce soit déjà fini ? Ai-je perdu la notion de temps à ce point ? D’autres caresses amènent du calme. Mon corps goûte, suit chacune de leurs lignes, courtise chacune de leurs courses. Il supplie en silence… encore !
Une main fait basculer ma tête sur ses genoux. Puis viennent les soupirs. J’expie. Je ne sais pas quoi mais quelque chose est en train de sortir. Et ses caresses… j’aimerai encore y être.
ETAT D’ESPRIT APRES LA SEANCE
Je me redresse (sur mes genoux). Son regard… sincèrement interrogateur, comme inquiet, et tendre. Touché… encore une fois.
– « Alors… tu es tout neuf ?«
La question me fait sourire. Oui, en effet, ça ressemble à ça. Mais trop tôt pour y réfléchir, étant encore en plein étourdissement.
Nous nous installons pour un débriefing. Je tourne la tête vers les couvertures, là où était ma place. Mais que vient-il de se passer exactement ? La musique reprend… « Muse ». Une de ces chansons que je n’avais pas attendues depuis des années. L’émotion me prend.
– « Alors… comment te sens-tu ?«
Ça monte. Encore. Beaucoup. Vais-je arriver à me contenir ?
Inutile… les larmes coulent déjà.
Fin 1ère partie
(la seconde partie se trouve ici)
Je reviens vers Vous le plus vite possible,
Avec mon plus droit dévouement,
florian
[…] (La première partie est ici) […]